TGP / Cœurs d’Amérindiennes
Les poèmes de quatorze femmes amérindiennes forment le cœur du prochain spectacle joué au CDN. Ces paroles teintées de mythologie disent aussi la dure réalité d’un peuple exilé chez lui. Elles sont portées par la comédienne Anne Alvaro, le chorégraphe Thierry Thieû Niang et le musicien Nicolas Daussy.
« Voici mon cœur. C’est un bon cœur. » Ces mots sont tirés d’un poème de Joy Harjo et composent le titre d’un spectacle présenté au TGP du 4 au 8 avril, mêlant poésie, danse et musique. Joy Harjo est l’une des quatorze femmes poètes amérindiennes qui forment le cœur – c’est le cas de le dire – de ce spectacle créé et interprété à trois par la comédienne Anne Alvaro, le danseur et chorégraphe Thierry Thieû Niang et le poly-instrumentiste Nicolas Daussy. C’est Anne Alvaro qui, la première, s’est penchée sur ces textes écrits par ces femmes à la faveur d’une lecture et qui a proposé à Thierry Thieû Niang de « faire quelque chose ensemble ».
Ce dernier, travaille en résidence au TGP depuis trois ans en direction notamment des femmes du quartier Franc-Moisin et des enfants de Saint-Denis. On lui doit ces extraordinaires moments que furent en 2016 Au Cœur et en 2017 Ses Majestés. Il a également travaillé l’été dernier au Québec avec des jeunes danseurs issus des minorités. Et a tout de suite plongé dans l’aventure des poétesses d’Amérique. « Je me suis rendu compte là-bas à quel point la danse est constitutive de la culture amérindienne », se souvient-il. Dès lors, croiser ces textes francophones d’amérindiennes contemporaines (elles ont toutes entre 50 et 70 ans) avec son art de la danse est devenu une évidence. D’autant plus avec Anne Alvaro, immense comédienne que l’on avait pu voir notamment en 2006 à Saint-Denis dans Le Marin, de Fernando Pessoa, mis en scène par Alain Ollivier. Elle y était, comme toujours, d’une justesse d’émotion rare.
Que disent ces poèmes ? La tradition, la nature, la famille, la place de la femme, la migration, l’exil… Ce sont des écritures oscillant sans cesse entre le naturalisme, presque pictural, et le réalisme le plus acéré, alternant le symbolisme de la tradition et de la mythologie amérindiennes et la dure réalité d’un peuple exilé chez lui, dont la culture se délie peu à peu au contact de la modernité.
« Mais ces textes sont très différents les uns des autres, on les feuillette comme un album., souligne Thierry Thieû Niang. Nous mêlons nos trois énergies, nos trois couleurs, poétique, musicale et chorégraphique. Nous voulons faire naître des paysages sonores et dansés, aller à la rencontre d’une culture comme lors d’un voyage, d’une traversée. Ce sera un concert poétique et chorégraphié, montrant quelque chose d’un ailleurs très proche… », ajoute-t-il, voyant dans cette expérience une magnifique façon de clore son cycle dionysien, en attendant son ultime ouvrage avec des jeunes dionysiens, en complicité avec Jean Bellorini, autour des Sonnets de Shakespeare. Ce sera les 2 et 3 mai, mais, d’ici-là, lui et ses complices nous offrent leurs cœurs. Et ce seront de bons cœurs.
Benoît Lagarrigue - Le Journal de Saint-Denis - 4 avril 2018 - Photo Pascal Victor
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