Duras en Blanc
Dans ce récit, Marguerite Duras raconte l’attente torturante de l’éventuel retour de son mari, Robert Antelme, résistant envoyé en déportation, dont elle reste sans nouvelles. En avril 1945, François Mitterrand, secrétaire général aux Prisonniers, Déportés et Réfugiés, apprend qu’il est encore en vie. Mais pour combien de temps ? Le typhus faisait des ravages, les Américains ont bouclé le camp de Dachau. Antelme, qui l’a attrapé, n’a pas le droit d’en sortir. Expert en faux papiers, Mitterrand manigance son évacuation, mais c’est un cadavre vivant qu’on hisse au 3e étage du 5 rue Saint-Benoît. Antelme ne pèse que 35 kilos et restera longtemps entre la vie et la mort. Le passage où Duras décrit le délabrement de ses fonctions vitales est digne de figurer au côté du récit que fait Saint-Simon de la gangrène de Louis XIV agonisant. En 2008, Dominique Blanc avait demandé à Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang de l’aider à porter « La Douleur » à la scène. Si minimaliste fut-elle, leur mise en scène semblait encore de trop. Le texte et l’actrice s’accordaient à la perfection, cela aurait suffi. Quatorze ans après sa création, le spectacle n’a rien perdu de sa force. La plainte rauque qui émane de cette actrice d’apparence si fragile glace le sang.
Jacques Nerson - L’Obs - 30 novembre 2022
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En répétition : Ovni rêveur, le corps éparpillé dans la têteThéâtre de Lorient